Vincent Garcia, rédacteur en chef de France Football, revient sur la création du Prix Sócrates et évoque la collaboration avec Peace and Sport.
Pouvez-vous nous expliquer la genèse du Prix Sócrates, et pourquoi avoir choisi ce nom pour un trophée qui récompense un engagement ou une cause ?
Le Prix Sócrates, créé en 2022, est une récompense qui se veut ouverte sur le monde, sur la société. Elle permet également de montrer un autre visage du footballeur, loin du cliché du joueur autocentré, égoïste. Le Prix Sócrates permet de mettre en lumière un footballeur ou une footballeuse qui s’investit pour les autres, qui donne de son temps, de son énergie et de son argent dans un projet solide. Souvent en toute discrétion.
Ces projets, ancrés dans le monde du football, ont un impact positif considérable sur la société et sur les communautés dont sont issus ces athlètes. L’objectif du Prix Sócrates est de valoriser et de donner de la visibilité à ces actions inspirantes, qui démontrent que le football peut être un formidable vecteur de transformation sociale.C’est important d’ajouter qu’avec le Prix Sócrates, on peut aussi récompenser des causes.
Le nom de ce trophée a été choisi parce que Sócrates représente une certaine liberté, un certain engagement. C’était un grand joueur sur et en dehors du terrain. Il s’est battu pour la démocratie au Brésil à l’époque de la junte militaire. Sócrates a toujours été engagé politiquement et socialement. On trouvait donc que nommer le prix ainsi, en s’associant avec Raí, l’un des frères de Sócrates, était une bonne idée. Raí est partie prenante dans les discussions sur les projets et sur le choix du lauréat, tout comme Peace and Sport.
« Peace and Sport sait ce qui fait ou non un projet solide »
Comment se passe la collaboration avec Peace and Sport pour le choix du lauréat ?
C’est très important que Peace and Sport travaille avec nous, car ils ont vraiment la vision des projets dans leur ensemble. Ils ont la connaissance technique pour repérer les projets solides. Lorsqu’on a créé le Prix Sócrates, on voulait qu’il y ait un sens, et que ça ne soit pas juste une opération de communication, ni un projet mal ficelé.
C’est Peace and Sport qui va juger de la qualité du projet, de son sérieux, et qui va sélectionner les meilleurs dossiers sur des critères définis ensemble à l’avance. Peace and Sport nous transmet donc 4 ou 5 dossiers qui vont être soigneusement étudiés. Ensuite, on se réunit tous – avec Raí également – pour valider le choix du lauréat du Prix Sócrates.
« Avec le Prix Sócrates, on peut récompenser des projets, mais on peut aussi récompenser des causes. »
Sadio Mané, Vinicius, Jennifer Hermoso… Pouvez-vous expliciter ce que vous avez souhaité récompenser lors des trois premières éditions du Prix Sócrates ?
Pour Sadio Mané en 2022, on a voulu récompenser son engagement dans son village natal, au Sénégal. C’est un joueur qui investit de son temps et de son argent dans la construction d’écoles et d’un lycée dans son village.
Pour Vinicius, on a récompensé un projet très solide. Le joueur s’est investi dans des projets d’aides – scolaires notamment – au Brésil, dans le quartier défavorisé où il a grandi. Avec son association, il s’est entouré de professeurs qui connaissent le terrain pour proposer de nouvelles techniques d’enseignement. Le projet de Vinicius est très structuré, bien pensé.
L’année dernière, avec le Prix Sócrates, on a récompensé une cause. La joueuse espagnole Jennifer Hermoso a été victime d’une agression sexuelle de la part du président de la Fédération espagnole de football, Luis Rubiales, à la fin de la finale de la Coupe du monde 2023. Elle a subi beaucoup de pression de la part de sa propre fédération pour ne pas témoigner contre le président. Cela a été difficile pour elle, mais elle est allée au bout de sa démarche en portant plainte et en faisant condamner Luis Rubiales à une amende pour agression sexuelle. C’était bien de récompenser cette joueuse, et à travers elle, la lutte contre les agressions sexuelles. Les femmes sont une partie importante du football, et de notre cérémonie du Ballon d’Or© .
Notez-vous un engagement accru des joueurs et des joueuses ces dernières années ?
Il y a toujours eu des footballeurs, et des sportifs de manière générale, engagés à travers des causes ou des projets pour aider les autres. Cela a toujours existé, même si ce n’est pas la majorité. L’engagement des footballeurs est une excellente chose pour casser cette image d’égoïsme qui peut coller, à tort ou à raison, à ce milieu.
Le Prix Sócrates, c’est aussi le moyen de montrer que dans vos médias, on ne parle pas que du côté purement sportif ?
Que ce soit à France Football ou à L’Équipe, c’est effectivement important de montrer toutes les facettes du milieu du football, et de ne pas se cantonner uniquement aux résultats et aux trophées. On l’a toujours fait, puisqu’on traite le sport dans son ensemble à travers des enquêtes et des reportages qui vont souvent bien au-delà du résultat brut.
Simon Bardet – Peace and Sport
